Papineau. Son influence sur la pensée canadienne/Chapitre XX


Papineau

Son influence sur la pensée canadienne

essai de psychologie historique
Chapitre XX. Papineau en exil






C’est terrible d’être soudainement projeté hors de son or­bite et après des années de lutte intensive de se trouver exté­riorisé de l’action et réduit à ne plus suivre les événements où l’on a été mêlé, pas même du gros bout de la lorgnette. Être prisonnier sur le rocher de l’île Sainte-Hélène ou sur l’île de Guernesey, entendre les rumeurs de l’océan, regarder défiler ses vagues moutonneuses, calmes et dociles comme des pen­sionnaires, ou bruyantes et tapageuses ainsi que des étudiants, c’est avoir l’illusion d’un public !... Papineau, après un voyage mouvementé dans la forêt qui longeait la frontière, toucha enfin la libre terre de la république américaine. Il n’éprouvait que peu de joie de se savoir hors d’atteinte de ses ennemis.

Le ronron des filatures, le nasillement des scieries, le gron­dement des hauts-fourneaux; le contraste de ces villes prospè­res avec l’agitation stérile de celles qu’il venait de laisser, lui étreignait le cœur. Il se disait avec tristesse que ce pays dont la civilisation était plus jeune que celle du Canada avait déjà eu la puissance de s’émanciper... Partout des écoles spa­cieuses où s’abritait la jeunesse studieuse, des noyaux de bi­bliothèques, des embryons de musées semblaient d’un bon augure pour l’avenir de ce vaste et magnifique pays. Est-ce qu’à l’ombre bienfaisante de la république de Franklin, la petite république canadienne, protégée, comme la Suisse, par le bon vouloir de ses voisins, n’aurait pas pu grandir et prospérer ? Il lui semblait impossible qu’elle refusât la tutelle d’une si in­téressante et si riche pupille ? C’est peut-être par une miséricor­dieuse intention que le destin l’avait conduit aux États, pour qu’il pût intéresser le Congrès au sort du Canada français ?

Le 4 janvier 1838, alors qu’il était à Hailsbury, il apprend qu’une assemblée de patriotes a lieu dans un parc d’Albany. Cinq à six milles personnes y assistent. Le soir, le gouver­neur de l’État de New-York rend visite à Papineau. On cause des affaires du Canada. Le 13 du même mois le procureur général de l’État de New York se rend auprès de Papineau, ainsi que le juge en chef et autres personnes influentes, pour savoir dans quelle mesure le gouvernement américain pourrait coopérer à la révolution canadienne. Leurs délibérations sont tenues secrètes. Entre-temps on donne des spectacles et des soirées dramatiques au bénéfice des patriotes. À l’une de ces soirées, une femme, drapée dans un pavillon tricolore, coiffée d’un bonnet phrygien, lit une adresse aux réfugiés politiques. Elle est applaudie frénétiquement.

M. Amédée Papineau, fils du chef révolutionnaire, a consigné dans ses mémoires tous les incidents qui ont marqué le séjour de son père pendant son exil aux États-Unis. Ceux qui ont eu l’avantage de consulter ces paperasses posthumes, ont pu voir que Papineau, rendu sur le territoire américain, a continué à aider les révolutionnaires en utilisant à leur profit le prestige de sa personne et les belles relations qu’il avait entretenues avec le monde officiel.

Après des alternances d’espoir et de déception, il eut le chagrin de constater que les États-Unis refusaient de venir en aide au Canada. Au moment le plus inattendu, le secrétaire d’État, Van Buren, fit passer un bill de neutralité, ce qui anéantit l’espoir d’une invasion du Canada par les troupes américaines, tant caressé par les réfugiés canadiens. Le Pilate américain, pour se laver les mains du sang de ce juste immolé par l’Anglais, allégua le respect des traités dont ils avaient fait fi quand il s’agissait d’obtenir leur propre indépendance, la sauvegarde du droit des gens. Mots sonores dont se payait l’égoïsme de ces richards. Les financiers ne sont pas d’ordinaire promoteurs des libertés qui viennent à l’encontre de leurs af­faires. La vérité, c’est que les Américains possédaient plus de territoire qu’ils n’en avaient besoin. Ils avaient moins l’am­bition de faire de nouvelles conquêtes que de conserver celles qu’ils possédaient. Ils auraient été bien sots de dépenser de l’argent et des hommes pour conquérir un pays qui leur ap­partenait de fait sinon de droit. Quand le fruit serait mûr, il tomberait du côté où penche l’arbre, c’est-à-dire de leur côté, et ils n’auraient qu’à le ramasser.

D’ailleurs, ils avaient tout à gagner dans cette rébellion qui rejetterait sur leur territoire des colons pour lesquels ils ne dé­pensaient pas un sou. L’exode, commencé au lendemain de la conquête, se continuait. Tous les jours, il en venait, cachés dans des charretées de foin, déguisés en colporteurs, en travestis, etc. Un courant de saine émigration se dirigeait de lui-même vers leur territoire. La sagesse enseigne qu’il faut attendre son heure, car la ligne imaginaire qui sépare les pays frères s’effa­cera d’elle-même. Sur ces entrefaites, le Docteur Côté, du Canada, réfugié aux États-Unis, fut arrêté et traduit de­vant la justice, sous l’accusation d’avoir violé la loi de la neutralité, en enrôlant des gens pour l’armée canadienne. La Cour de Windsor l’acquitta.

Les patriotes apprirent avec joie que 75 barils de poudre étaient disparus mystérieusement de Batavia. L’arsenal d’Élisabeth Towne fut également cambriolé, 1 200 fusils, 150 gibernes et havresacs, 26 carabines, 20 pistolets manquaient à l’appel. Était-ce pour le Haut-Canada ou le Bas-Canada que les Américains se laissaient si complaisamment subtiliser des armes ? Papineau n’était pas le seul chef révolutionnaire à errer sur la terre étrangère. W. Lyon Mackenzie évoluait dans la même zone de poudre ainsi que Papineau, O’Callaghan, Nelson, Davignon, Dr. Côté. Il est certain que les sympathies populaires se portaient vers les chefs patriotes, mais la politi­que a des raisons que la raison ne comprend pas ! Parmi les sphinx qui siégeaient à Washington et dont la figure ne laissait pas deviner les impressions, il y avait des amis déclarés de l’Angleterre. Libérés de sa tyrannie, ils tenaient à conserver avec elle des relations commerciales. Papineau eut une des grandes déceptions de sa vie, quand il découvrit l’indignité ou l’incons­cience des hommes qu’il avait placés si haut dans son admira­tion. Vus à travers son rêve démocratique, ils semblaient bien différents de ce qu’ils étaient en réalité. Soldat du verbe, rompu aux joutes oratoires, il avait cru avoir la partie belle avec les maîtres du Capitole, comme avec les lords d’Angleterre, mais il s’aperçut bien vite de l’infériorité de ces marchands de Chi­cago, de ces magnats de la finance new-yorkaise, comparés aux hommes d’État anglo-saxons, accessibles à l’élévation de sentiments, aux considérations philosophiques, aux idées libé­rales du siècle.

Il avait été discuté à Londres. On l’écouta distraitement à Washington, lui le grand seigneur de la politique. Il fut blessé de la vulgarité, de la mesquinerie, de la dureté, de la mau­vaise foi de ces parvenus qui lui avaient tacitement promis leur appui et se dérobaient au moment de faire honneur à leurs engagements. Il comprit que les droits sont un vain mot si les peuples ne sont pas assez forts pour les défendre. Quand un pays veut avoir son indépendance, il ne doit compter que sur lui-même. Malgré l’aide de la France, la Pologne et l’Ir­lande sont toujours esclaves. Si le Canada veut se libérer, il lui faut, par sa propre puissance, soulever le couvercle du sé­pulcre qui le garde dans la nuit du tombeau.

Papineau perdit la dernière et la plus chère de ses illusions, mais comme ces croyants qui font de spécieuses distinctions entre le prêtre et la religion, il accusait les membres du congrès de déloyauté, sans tenir rigueur à sa République idéale, restée belle et pure malgré l’indignité de ses ministres. II crut en elle jusqu’à sa mort. Son âme profondément religieuse sentait le besoin de se rattacher à un culte quelconque. Il n’était pas de ceux qui veulent éteindre les étoiles au Ciel, il en aurait plutôt allumé d’autres pour satisfaire à son besoin d’adoration. Il croyait au progrès, au perfectionnement humain. Il voyait la république à travers les philosophes de l’Antiquité et les moralistes du jour, c’était sa mystique, elle le posséda tout entier. Il lui importait peu d’en être le premier consul, le dictateur ou le président, puisqu’il avait pratiquement abdiqué entre les mains de Nelson, mais il voulait voir le nouveau règne de la démocratie dont celle des États-Unis lui paraissait être le proto­type. Il avait vu de ses yeux que c’est dans ce creuset que les peuples, venus de partout se mêlent, se fondent, pour en sortir purifiés et débarrassés de leur gangue. En prenant contact avec cette population homogène et bon enfant, plus affinée à chaque génération, dont la joie de vivre éclatait par tous les pores et qui s’épanouissait librement, il pensait à cette autre, mieux douée, supérieure d’instincts, qui s’anémiait à quelques milles de distance, privée d’instruction et de liberté, vouée au dur labeur des champs, pauvre et mal nourrie. Plutôt que d’ac­cuser le sort d’injustice, il s’en prenait à cette forme de gou­vernement qui autorisait et légalisait toutes les tyrannies. Il suivait de loin les tragiques événements qui se déroulaient dans son pays; il vivait la douloureuse passion de ses disciples et les phases angoissantes de son rêve fait chair. Il s’iso­lait dans un deuil sévère. Nous avons eu l’avantage de connaître un de ses compagnons d’infortune sur la terre d’exil; il nous disait que dans toute la durée de son séjour à l’étranger personne ne l’avait jamais vu sourire. Il souffrait physiquement des maux qu’enduraient ses compatriotes, au point qu’à la longue, ses traits s’étaient contractés et qu’un pli douloureux, qui ne s’est jamais effacé, meurtrissait le coin de sa bouche. Ceux qui ont prétendu que Papineau s’était endormi dans les délices de Capoue pendant que les autres montaient le Gol­gotha ont odieusement menti. Jamais peut-être il n’a autant souffert, sans se repentir, car il avait la raison trop droite pour se donner tort, quand la justice avait inspiré ses actes. Seule la fatalité avait voulu que tant de nobles victimes fussent broyées sous l’impitoyable roue du progrès à laquelle il imprimé le premier mouvement. Pourquoi aurait-il regretté d’avoir voulu la libération des siens et le bonheur de sa patrie ? Mais quand il lut le testament de de Lorimier, arrivé à ce passage :

Je meurs sans remords, je ne désirais que le bien de mon pays dans l’insurrection et l’indépendance. Mes vues et mes actions étaient sincères et n’ont été entachées d’aucun des crimes qui déshonorent l’humanité et qui ne sont que trop com­muns dans l’effervescence des passions déchaînées. Depuis dix-sept et dix-huit ans, j’ai pris une part active dans tous les mouvements et toujours avec conviction et sincérité (Un feu de paille qui flambe pendant dix-huit ans) — Mes efforts ont été pour l’indépendance de mes compatriotes. Nous avons été malheureux jusqu’à ce jour. La mort a déjà décimé plusieurs de mes collaborateurs. Beaucoup gémissent dans les fers, un plus grand nombre sur la terre d’exil avec leurs propriétés détruites, leurs familles abandonnées sans ressources aux ri­gueurs d’un hiver canadien. Malgré tant d’infortunes, mon cœur entretient encore du courage et des espérances pour l’ave­nir; mes amis et mes enfants verront de meilleurs jours. Ils seront libres, un pressentiment certain, ma conscience tran­quille, me l’assurent. Voilà ce qui me remplit de joie quand tout est désolation et douleur autour de moi. Les plaies de mon pays se cicatriseront après les malheurs de l’anarchie et d’une révolution sanglante. Le paisible Canadien verra renaître le bonheur, la liberté, sur les bords du Saint-Laurent. Tout concourt à ce but, les exécutions même, le sang et les lar­mes versés sur l’autel de la liberté arrosent aujourd’hui l’arbre qui fera flotter le drapeau des deux étoiles des Canadas. Je laisse des enfants qui n’ont pour héritage que le souvenir de mes malheurs. Pauvres orphelins, c’est vous que je plains, c’est vous que la main ensanglantée et arbitraire de la loi martiale frappe par ma mort. Vous n’aurez pas connu la douceur d’embrasser votre père aux jours d’allégresse, aux jours de fête. Quand votre raison vous permettra de réfléchir, vous verrez votre père qui a expié sur le gibet des actions qui ont immortalisé d’autres hommes plus heureux. Le crime de votre père est dans l’irréussite !

Papineau toujours solennel, avait lu debout cet ultime message du brave de Lorimier, mais il avait présumé de ses forces, arrivé à la dernière phrase, il s’affaissa sur son siège, blanc comme un suaire. On crut un instant qu’il allait s’évanouir, mais il parvint à surmonter son émotion. Le courage et les sublimes sentiments exprimés par Duquette à ses derniers moments, la crânerie si française de Hindelang, la belle résignation de Robert, de Hamelin, des deux frères Sanguinet, du notaire Decoigne, de Narbonne, de Daunais, la tirade enflammée de Hindelang, au moment où le bourreau s’apprêtait à lui passer la corde au cou : « Liberté ! Liberté ! qu’il serait beau de mourir pour toi ! Qu’il serait beau faire comprendre aux Canadiens tout ce que tes amants reçoi­vent de force et de courage en te servant... Vive la Liberté ! »

Papineau pleura... Mais il ne voulait pas qu’on prît ses larmes pour de la faiblesse, pour de la pitié : « C’est d’orgueil que je pleure... », disait-il. Il avait raison d’être fier de ses coopérateurs. Ils étaient une magnifique démonstration de ses théories libertaires. « Le dernier banquet des condam­nés, qui rappelait celui des Girondins », selon M. David, les avait disposés à bien mourir. Ces stoïciens trinquèrent à la liberté et portèrent des toasts à l’indépendance du Canada. Les discours coulaient plus généreusement que le vin. Mais ils s’attendri­rent moins sur leur sort que sur celui des veuves et des orphe­lins. Quand à l’aube, le geôlier vint les chercher pour le sacri­fice suprême, tous marchèrent d’un pas assuré vers la potence. Hindelang seul refusa le secours du prêtre à ses derniers moments. Il se contenta d’incliner la tête pendant qu’on récitait les der­nières prières pour les suppliciés. Il trouva dans son sublime sacrifice la force de voir venir la mort. On n’a rien à redouter de l’éternité quand on s’est absolument dévoué pour le bien d’autrui... Mais la pensée de Papineau se reportait toujours sur de Lorimier, son disciple le plus cher, celui qui, suspendu à ses lèvres dans les assemblées politiques, buvait ses paroles comme une liqueur de flamme. Sur un geste, sur un signe du grand homme, il eut risqué cent fois sa tête. Ces paroles surtout retentissaient à son oreille : « Le crime est dans l’ir­réussite ! !... » C’est vrai que Washington, Guillaume Tell n’étaient pas plus grands que ces modestes héros et si le succès avait couronné leur œuvre, au lieu d’être des rebelles, ce se­raient des sauveurs. Ces désolantes considérations, qui assom­brirent les derniers moments de de Lorimier, hantaient l’esprit de Papineau. Mais pourtant, à cette heure ultime, le rideau qui nous voile l’avenir devait se déchirer devant ses yeux pour qu’il entrevit l’apothéose dernière !

Ces hommes ont été vaincus par la mort, mais à leur tour, ils ont vaincu le mauvais sort acharné sur leur patrie. Il ne faut pas faire de restrictions dans notre reconnaissance, ni éta­blir d’outrageantes comparaisons entre ceux qui moururent pour la patrie, et ceux qu’un hasard pitoyable a tirés des serres de l’oiseau de proie. Celui qui consacre sa vie entière à une œuvre de libération est l’égal de celui qui a donné son sang pour en faire une bienfaisante réalité. Les exilés des Bermudes ont mérité de la patrie tout autant que ceux qui sont montés sur l’échafaud. Tous ont couru les mêmes risques, le martyr des uns a duré quelques heures, celui des autres a tenaillé toute leur existence.

Les hommes font la révolution mais, en retour, la révolu­tion fait les hommes. Qu’elle les dévore après l’œuvre accom­plie, c’est dans sa logique qui nous semble illogique comme bien d’autres choses dans le monde, entre autres la mort et l’iné­galité des conditions. Cependant tous ces héros de l’action et de l’esprit seraient déjà perdus dans l’oubli au lendemain d’un mouvement avorté, mais dont les conséquences ont été infinies pour nous, si quelques écrivains n’avaient entrepris de les sauver du néant. Ils furent — hélas ! — trop vengés de l’indiffé­rence des premières années par l’abus qu’on a fait ensuite de leur auréole. Tous ont ensuite tiré sur leur gloire sans vergo­gne. Le politicien véreux, le démagogue imprudent, l’agioteur sans scrupule se drapent dans leur pourpre pour jouer le rôle des pères nobles. Papineau du moins a échappé à cet outrage. Sa cotte de maille et son casque étaient trop lourds pour les aigrefins d’aujourd’hui ! Nos pygmées se seraient perdus dans l’ampleur de sa toge. Mieux valait laisser son spectre aux oubliettes que de lui imposer nos mascarades. N’en disons rien plutôt que d’employer des phrases prostituées qui ont servi à tout le monde. Il faut le feu nouveau des Jeudis saints pour brû­ler devant comme le Prométhée de cette ténébreuse époque. C’est de son cerveau qu’est sortie, bien mal armée, hélas ! la pensée salvatrice. Cessons de lui en vouloir, parce que le capuchon du bourreau, pas plus que l’éteignoir du fanatisme, ne s’est abaissé sur cette belle tête lumineuse.

Papineau n’a pas repoussé le calice qui s’offrait à ses lèvres. Il n’était pas de ceux qui chipotent sur le prix de la gloire. Il croyait nécessaire pour les Canadiens-français de refaire leur trempe morale. Dans le temps, la seule valeur ayant cours, c’était la valeur guerrière; c’est pourquoi il s’attacha à réveiller les nobles instincts de la race et à stimuler son ardeur virile, parce que seules les nations sans ressort subissent la tyrannie avec résignation. Le temps des atermoiements de la passivité était passé. Les peuples opprimés et abaissés devaient se ra­cheter par la décision et la volonté. Son éloquence les éperonna pour les faire sortir de leurs gonds, non parce qu’il était avide de carnage et qu’il aimait l’odeur de la poudre, mais parce que, comme dit la bible : « la vie vient du sang » et qu’il fallait teindre du sang du lion plutôt que de celui de l’agneau les portes des maisons où se trouvaient des enfants mâles pour les guérir de leur tares originelles. Tant mieux pour son nom, si la pos­térité lui tient compte des immolations qui nous ont valu nos libertés. Nous ne sommes pas de ceux qui lui imposeront un nouveau baptême pour laver son front d’une tache lumineuse comme on en voit aux disques des astres. Nous lui laisserons la responsabilité de son acte qu’il portera comme le Christ, sa croix. Il a opéré la multiplication des héros. Ils étaient trente aussi ardents, aussi éloquents que lui. Leur pensée décompose le reflet de la sienne. De Lorimier, Cardinal, Hindelang, Chénier, Robert Nelson parlaient comme lui. Son caractère est celui de la nation même. Il a tiré du chaos de nos origines un type impérissable, si nous voulons bien lui prêter vie, parce que toutes les mères du temps ont été impressionnées par cette figure extraordinaire et l’unique Papineau a été tiré à cent mille exemplaires. Reconnaissons donc en Papineau notre meilleure valeur. C’est lui que le destin a délégué pour montrer aux siècles futurs ce que nous avons été et pouvons être. C’est l’alchimiste qui a transmuté la matière grossière de nos ori­gines en un métal qu’il ne tient qu’à nous d’épurer sans cesse.






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