« Mémoire de Pierre du Calvet » : différence entre les versions

De La Bibliothèque indépendantiste
Aller à la navigation Aller à la recherche
Aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Ligne 72 : Ligne 72 :


== Notes de l'éditeur ==
== Notes de l'éditeur ==
{{GFDL}}

Version du 8 juillet 2009 à 21:58


Mémoire de Pierre du Calvet, écuyer

de Montréal, dans la Province de Québec.
Londres, mars 1784

(Traduction en cours.)



Dédicace

À Sa très Excellente MAJESTÉ,
GEORGES III.
Roi de la Grande-Bretagne,
ET
Des Provinces y appartenant, etc. etc.

Sire,

George III du Royaume-Uni (1760 – 1820)

Un roi est pour ses peuples; et ce sont les cœurs de ses sujets qui forment le tribunal où se décide sans appel le genre d'immortalité qui l'attend. Les nôtres ont depuis longtemps prononcé en faveur de Votre Majesté: Elle met sa gloire à être le père de ses sujets: Elle n'estime dans la royauté que le pouvoir qu'elle Lui donne de faire des heureux. La clémence, l'humanité, l'amour de la justice et des lois, toutes les vertus règnent avec Elle sur le trône. La reconnaissance publique se charge de transmettre à la postérité, le nom de Votre Majesté, avec tous les transports de l'admiration et de l'amour.


Un souverain d'un caractère aussi auguste ne mérite que des sujets qui lui ressemblent. S'il députe des officiers généraux pour le représenter dans ses domaines éloignés, ce ne peut être que dans la confiance et la présomption de leur voir copier les vertus d'administration. Tromper des vues si dignes de la royauté, ce serait trahir la royauté même en lui imprimant une tache étrangère, qu'elle ne serait pas capable d'imprimer elle-même à sa gloire.

Cette trahison, Sire, cette dégradation de la grandeur royale a osé se produire à la face de toute une colonie anglaise. Un étranger (car un Anglais, député pour représenter le meilleur des princes, rougirait d'être tyran) un étranger en est le détestable auteur. L'infortunée province de Québec a été le théâtre où elle a éclaté avec audace, à la terreur de tous les habitants. Le despotisme dans le cœur et un sceptre de fer à la main, le gouverneur Haldimand n'y gouverne pas, mais il y gourmande les peuples en esclaves. À la faveur des oppressions les plus atroces, il n'oublie rien pour affaiblir — que dis-je? pour briser sans retour — les liens de sentiments qui attachent les sujets au souverain: il compromet, par ses vexations inouïes, l'honneur de la nation, qui met sa gloire à n'avoir dans son sein que des hommes libres et qui ne se doutait pas, en l'adoptant, qu'elle incorporait un tyran résolu à mettre aux fers une partie de ses sujets; car telle est aujourd'hui, sire, la triste destinée de la province de Québec: tout y gémit sous un joug de fer: la tyrannie y déploie sans ménagement tout l'appareil de ses fureurs: les pleurs, les gémissements, la terreur, le désespoir, y règnent de toutes parts; et, si diverses circonstances ne mettaient des entraves à une fuite générale, la province de Québec serait bientôt déserte. Ce qu'il y a de plus atroce, c'est que l'auteur de ces calamités prétend les consacrer, en se parant du nom de Votre Majesté qu'il représente, et en se couvrant de l'autorité royale, en vertu de laquelle il prétend agir; c'est-à-dire, qu'à ne juger de la personne royale, que sur ses prétentions, du meilleur des princes dans lui-même à Londres, le général Haldimand en fait à Québec le plus odieux des souverains par représentation. L'outrage fait au monarque et aux sujets est sanglant: mais, placé au-dessus des lois par sa place, le coupable se joue à Québec de toute justice; il y triomphe de son injustice, et y jouit avec impunité de ses fureurs.

Bourrelé par les remords cuisants d'une conscience qui le juge et le condamne, le gouverneur Haldimand n'ignore pas la vengeance éclatante que les lois lui préparent à Londres. Il ne peut leur échapper, que par une fuite clandestine et honteuse dans sa patrie, pour aller y étaler le spectacle d'une opulence gagnée dans un service qu'il a déshonoré par la tyrannie. C'est à cette indigne mesure qu'il semble vouloir avoir recours, quand l'expiration de son gouvernement, en le rendant à sa condition privée, l'aura conséquemment rendu justiciable des lois.

Sire, la gloire de la personne royale de Votre Majesté, la gloire de toute la nation, celle, enfin, de la constitution d'Angleterre, réclament hautement pour le punir, ou lui ou moi; — Lui, s'il a déshonoré la majesté royale qu'il représentait; — moi, si j'ose ici déférer injustement le représentant de mon souverain, au tribunal de mon souverain même et à celui de toute la nation. Avoir représenté au meilleur des princes les droits de la justice opprimée est un gage assuré de la voir bientôt satisfaite par les voies dignes de sa sagesse et de son équité.

Dans un cas d'une conséquence bien moins importante, d'un sujet canadien (Monsieur Cugnet de Québec, en l'année 1762) qui se plaignait, quoiqu'à tort, des invectives outrageantes d'un gouverneur (le général Murray), Votre Majesté fit juger juridiquement l'accusé, sans avoir égard à sa qualité de gouverneur. Je ne puis citer à l'imitation de Votre Majesté, un plus illustre modèle à copier, que Votre Majesté même; — surtout dans une circonstance où toute une colonie alarmée, (pour se consoler de ses malheurs dans l'espérance de les voir adoucis ou réparés) attend la justice que je sollicite, dans le mémoire que j'ai l'honneur de présenter au trône et qui ne contient qu'une légère ébauche de mes persécutions et de celles de tous les Canadiens. Sur le bord de ma fosse, creusée d'avance sous mes pieds par les violences de la tyrannie, mon jugement est l'unique espérance qui me reste pour mourir au moins avec honneur et content.

J'ai l'honneur d'être, avec le plus profond respect et le dévouement le plus universel,

Sire,
de Votre Majesté,
le très-humble et très obéissant serviteur,
et très-affectionné sujet,

Pierre du Calvet.

Avertissement

Le présent mémoire de Pierre du Calvet a été rédigée sous sa direction et d'après les matériaux qu'il a lui-même fournit; et chacune de ses pages lui fut expliquée dans la langue française dès qu'elle fut écrite; et des altérations et corrections furent faites en divers endroits lorsqu'il les cru nécessaires afin d'exprimer parfaitement sa pensée: De sorte que le mémoire puisse être considérée à juste titre comme étant autant sa propre déclaration des faits que s'il l'avait écrit lui-même dans la langue française.



Biographie introductive

M. du Calvet est un Français protestant; né en la province de Guyenne dans la Vieille France, d'une bonne famille de Toulouse et des environs. Il était héritier d'un beau domaine terrien dans ce pays, qui lui est échu depuis, à la mort de son père en l'année 1762.

En l'année 1758, quand la province de Québec, alors appelée le Canada, était encore sujette à la couronne de France, il résolu d'y entrer et de s'y établir comme négociant, et, dans ce but, il se procura un assortiment de marchandises approprié au commerce de ce pays, avec lequel il fit voile à destination de Québec au début d'avril 1758. Il fit naufrage dans le fleuve Saint-Laurent, à environ 100 milles de la ville de Québec, et perdit sa marchandise; mais il poursuivit son voyage sans elle jusqu'à Québec où il arriva dans le mois de juin. Il ne resta à Québec qu'un court moment, et se rendit peu après, vers la fin de juillet, à Miramichi, un port français situé dans une partie de l'Acadie, ou de la Nouvelle-Écosse, qui porte ce nom, transportant avec lui un nouvel assortiment de marchandises qu'il s'était procuré à Québec, où il avait été nommé Garde-magasin en chef, ou principal Commissaire des provisions et magasins du Roi de France dans ce port, lieu où s'étaient réfugié de nombreux colons français des diverses régions de la Nouvelle-Écosse, ou Acadie, qui sont généralement connus sous le nom d'Acadiens, et qui dernièrement ont été expulsés de leurs établissements par le gouvernement britannique. Ces malheureuses personnes, au nombre de trois à quatre mille âmes, vivaient à cette époque au dépend du Roi de France qui les soutenait avec les provisions de ses magasins. Dans ce port de Miramichi il y avait à cette époque une centaine de prisonniers anglais, principalement des officiers et des soldats; auxquels M. du Calvet offrit tous les services dont il était capable en sa qualité de Commissaire principal, à la fois au ci-devant mentionné port de Miramichi de même qu'au poste de Ristigouche dans la Baie des Chaleurs, où M. du Calvet relocalisa les magasins et provisions du roi dans le mois de mai 1759 qui suivit, et qui se situait à environ 200 milles au nord de l'ancien poste. De ce bon traitement des prisonniers anglais de ce poste, l'extrait suivant d'un certificat qui lui fut remis par le lieutenant Caesar McCormick, du corps des Rangers du Major Roger, dont il faisait partie, servira de preuve suffisante.

To any of his Majesty's Officers, greetings.

"Whereas the bearer, Mr. Du Calvet, Commissary at Ristigouche, has been of greatest succour to our poor prisoners here, I do hereby earnestly beseech any of his Majesty's subjects into whose hands he may fall, to let the world see that the candour of Britons surpasses that of all other nations; and they will oblige him who suffers daily in being absent from the glorious expedition now in hand."

McCormick.

Ristigouche,
August 28, 1759.

Mais avant que M. du Calvet ne quitte cet emploi, il eut l'opportunité de rendre un service plus important à M. McCormick et environ trente de ses soldats. Plusieurs de leurs compagnons avaient été relâchés sur ordre du commandant français au dit poste de Miramichi, pour être envoyés par mer au Fort Cumberland ou à Halifax, en Nouvelle-Écosse, en raison de l'inconvénient qu'il y avait de les garder prisonniers, consommant les provisions des magasins du roi, qui fondaient, et qui étaient en si grande demande auprès des pauvres Acadiens dans le pays, et des Indiens alliés aux Français réunit sur place. Et lorsqu'on commença à penser que Québec alors être ou était déjà prise par l'armée du général Wolfe, Monsieur Bourdon (le principal officier du roi de France alors en poste à Ristigouche) pris la décision (décision qu'appuyèrent les Acadiens dans la région du poste) de relâcher le lieutenant McCormick et le reste des prisonniers, au nombre de plus de trente, et de les convoyer par mer jusqu'au Fort Cumberland, près de Halifax. Ceci se produisit vers la fin d'août 1759.

Dès que les Indiens du poste et des environs, au nombre d'à peu près 200, furent au fait de cette décision, ils se réunirent et résolurent de tenter d'empêcher son exécution. Ils dirent : « Que jusqu'ici le poste de Ristigouche était inconnu des Anglais, et conséquemment peu susceptible d'être attaqué, comme l'avait été le poste de Miramichi; mais que, si les prisonniers étaient libérés, et autorisés à se rendre au Fort Cumberland ou Halifax, ils mettraient leurs compatriotes au courant de son emplacement; et que la conséquence de cela serait qu'un parti de troupes anglaise serait envoyé pour l'envahir, brûler leurs huttes et les chasser du pays; — et que donc il devenait nécessaire de mettre tous ces prisonniers à mort. » Et conséquemment ils ont déterminé de tomber sur les prisonniers pour les assassiner sans délais, en vue de prévenir leur libération. Cette détermination des Indiens alarmèrent gravement M. du Calvet et Monsieur Bourdon (le principal officier à Ristigouche); Et ils ont donc convoqués une assemblée des Acadiens qu'ils avaient sous leur commandement afin de les consulter sur le meilleur moyen de protéger les prisonniers contre la fureur des Indiens; Et à cette assemblée il fut résolu d'envoyer immédiatement les prisonniers à bord d'un vaisseau d'environ 60 tonnes, avec trente hommes choisis pour les protéger contre toute tentative des Sauvages, et que le vaisseau devrait être immédiatement mis à l'ancre au milieu des quelques autres qui étaient déjà ancrés au port, afin de lui fournir la plus grande sécurité.

La déportation des Acadiens à Grand-Pré en septembre 1755. Tableau de George Craig, 1893. Musée acadien de l'Université de Moncton.

Ces mesures furent une grande déception pour les Sauvages, qui ont immédiatement résolu de se rendre à un endroit appelé Carraquet, à l'embouchure de la Baie des Chaleurs, là où ils savaient que le vaisseau transportant les prisonniers devrait forcément passer pour atteindre Fort Cumberland, et où, en toute probabilité, il aurait à jeter l'ancre pour un certain temps, à cause des rochers et des breakers qui abondent dans cette partie de la Baie des Chaleurs, ce qui rend le passage dangereux et difficile sauf si le temps est très favorable. Là les Sauvages résolurent de way-lay le navire, de l'attaquer et de mettre à mort les prisonniers anglais. Et suivant cette résolution ils sont immédiatement partis à bord d'environ quinze canots, transportant de quatre à six hommes chacun, tous bien armés, pour se rendre en longeant le rivage afin d'éviter les rochers et les breakers qui sont un danger pour les vaisseaux plus profonds.

Ces mouvements de la part des Sauvages alarmèrent M. du Calvet et M. Bourdon (l'officier en commande à Ristigouche) et leur fit prendre la résolution d'user de tous les moyens possibles afin de prévenir un outrage si cruel. Ils ont donc fait appel à plusieurs des Acadiens sous leur protection et les exhortèrent de la manière la plus forte sous tous les motifs de religion, d'humanité et de politique de les aider à protéger les prisonniers anglais contre une attaque des Sauvages. Les Acadiens consentirent rapidement à faire tout leur possible à cette fin; et M. du Calvet sélectionna soixante des plus vaillants parmi eux et ensemble ils embarquèrent en armes dans un autre vaisseau d'environ 60 tonnes, appelé le Jason, pour surveiller et garder le vaisseau transportant les prisonniers anglais;

Compte-rendu des persécutions envers la personne de Pierre du Calvet

Compte-rendu des attaques contre la fortune de Pierre du Calvet

Compte-rendu des actions de Pierre du Calvet pour obtenir justice auprès des Ministres d'État en Angleterre

Notes de l'auteur

Notes de l'éditeur


GFDL Vous avez la permission de copier, distribuer et/ou modifier ce document selon les termes de la Licence de documentation libre GNU, version 1.2 ou plus récente publiée par la Fondation pour le logiciel libre; sans sections inaltérables, sans texte de première page de couverture et sans texte de dernière page de couverture.