Loi instituant la Commission sur l’avenir politique et constitutionnel du Québec


Loi instituant la Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec
sanctionnée le 4 septembre 1990




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Préambule

CONSIDÉRANT que les Québécoises et les Québécois sont libres d'assumer leur propre destin, de déterminer leur statut politique et d'assurer leur développement économique, social et culturel;

Considérant la volonté des Québécoises et des Québécois d'être partie prenante à la définition de l'avenir politique et constitutionnel du Québec;

Considérant que la Loi constitutionnelle de 1982 a été proclamée malgré l'opposition de l'Assemblée nationale;

Considérant l'échec de l'Accord constitutionnel de 1987 visant à permettre au Québec d'adhérer à la Loi constitutionnelle de 1982;

Considérant la nécessité de redéfinir le statut politique et constitutionnel du Québec;

Considérant que le Québec a d'ores et déjà témoigné de son attachement aux valeurs démocratiques et aux droits et liberté de la personne;

Considérant que le Québec a reconnu la volonté des Québécoises et des Québécois d'assurer la qualité et le rayonnement de la langue française et d'en faire la langue de l'État et de la Loi aussi bien que la langue normale et habituelle du travail, de l'enseignement, des communications, du commerce et des affaires;

Considérant que le Québec entend poursuivre cet objectif dans un esprit de justice et d'ouverture, dans le respect des droits et des institutions de la communauté québécoise d'expression anglaise;

Considérant que le Québec reconnaît aux Amérindiens et aux Inuit du Québec le droit de maintenir et de développer leur spécificité et d'assurer le progrès de leurs communautés et qu'il considère primordial l'apport des communautés culturelles au développement du Québec;

Considérant l'apport du Québec aux communautés francophones hors Québec et à la francophonie internationale;

Considérant la maturité et la vigueur de l'économie du Québec et la volonté manifeste des Québécoises et des Québécois d'en assurer le développement et la croissance, en respectant à la fois les exigences de la mondialisation des marchés et celles de la justice sociale;

Considérant, dès lors, qu'il y a lieu de créer une commission extraordinaire pour étudier et analyser les statut politique et constitutionnel du Québec;

LE PARLEMENT DU QUÉBEC DÉCRÈTE CE QUI SUIT:

Section I. Institution et mandat

1. Est instituée, sous l'autorité de l'Assemblée nationale, la Commission sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec.

2. La Commission a pour mandat d'étudier et d'analyser le statut politique et constitutionnel du Québec et de formuler, à cet égard, des recommandations.

3. La Commission peut, pour l'exécution de son mandat, faire les études et les consultations qu'elle juge nécessaires.

Elle privilégie, entre autres moyens :
- la tenue d'audiences publiques dans diverses régions du Québec;
- l'audition d'experts;
- la tenue de forums sur des aspects particuliers de l'objet du mandat, notamment l'aspect social, culturel, démographique et de développement régional.

4. Au plus tard le 28 mars 1991, la Commission doit faire rapport à l'Assemblée nationale.

Elle remet son rapport au président de l'Assemblée nationale et le rend public par les moyens qu'elle juge appropriés.
Le président dépose le rapport devant l'Assemblée nationale sans délai ou, si elle ne siège pas, dans les 15 jours de la reprise de ses travaux.

Section II. Membres

5. Les personnes suivantes, nommées par l'Assemblée nationale ou, si elle ne siège pas, par le président de l'Assemblée nationale, font partie de la Commission à compter de leur nomination :

1° deux présidents nommés sur proposition conjointe du Premier ministre et du Chef de l'opposition officielle;
2° seize députés de l'Assemblée nationale, selon la répartition suivante :
a) neuf du parti gouvernemental, nommés sur proposition du Premier ministre;
b) six du parti de l'opposition officielle, nommés sur proposition du Chef de l'opposition officielle;
c) un député de l'autre parti représenté dans l'opposition, nommé sur proposition des députés de ce parti;
3° douze personnes, nommées sur proposition du Premier ministre faite après consultation du Chef de l'opposition officielle, et choisie selon la répartition suivante :
a) deux élus municipaux;
b) quatre personnes du milieu des affaires;
c) quatre personnes du milieu syndical;
d) une personne du milieu des coopératives;
e) une personne du milieu de l'enseignement ou de la culture;
4° trois députés de la Chambre des Communes du Canada, nommés sur proposition du Premier ministre faite après consultation du Chef de l'opposition officielle, et représentant, depuis la dernière élection générale, une circonscription électorale située au Québec.

6. Le Premier ministre et le Chef de l'opposition officielle sont également membres de la Commission.

7. Une personne cesse d'être membre de la Commission dès qu'elle perd la qualité requise pour sa nomination.

8. Un membre visé à l'un des sous-paragraphes du paragraphe 3° de l'article 5 peut faire part par écrit au président de l'Assemblée nationale du nom d'une personne qui accepte d'être son suppléant. Cette personne doit être domiciliée au Québec et avoir, en application de ce sous-paragraphe, la qualité requise pour être membre. Le président nomme alors cette personne membre suppléant de la Commission.

Un membre ne peut désigner qu'un seul suppléant pour la durée de son mandat.

9. Le membre suppléant peut siéger à la Commission en cas d'incapacité d'agir ou d'absence temporaire du membre dont il est le suppléant. Il ne peut cependant y voter ni y faire de proposition.

10. Les membres de la Commission qui sont députés à l'Assemblée nationale peuvent être remplacés pour une séance de la Commission par tout autre député de l'Assemblée. Toutefois, ils ne peuvent l'être lorsque la Commission se prononce sur les recommandations qu'elle a mandat de formuler.

11. Les membres de la Commission reçoivent les allocations déterminées par un règlement du Bureau de l'Assemblée nationale.

12. Lorsqu'il siège à la Commission, un député de l'Assemblée nationale jouit des mêmes droits, privilèges et immunités et a les mêmes obligations que s'il siégeait à une commission parlementaire.

Nul autre membre de la Commission ne peut être poursuivi pour un acte fait de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions.

Section III. Organisation

§ 1.–Présidence

13. La présidence de la Commission est assurée conjointement par les présidents.

Elle peut cependant être assurée par l'un d'eux lorsqu'ils en conviennent.

14. Les présidents convoquent et animent les séances de la Commission. Ils participent à ses délibérations et ont droit de vote. Ils dirigent les travaux de la Commission et veillent à la bonne exécution de ses décisions.

15. Les présidents exercent, pour l'application de la présente loi, les attributions conférées par la loi à un dirigeant d'organisme. Ils peuvent, malgré toute disposition de la loi, déléguer ces attributions à toute personne qu'ils désignent.

§ 2.–Comité directeur

16. Est institué un Comité directeur de la Commission formé des membres suivants :

1° les présidents;
2° six députés de l'Assemblée nationale désignés comme suit :
a) quatre, par le Premier ministre;
b) deux, par le Chef de l'opposition officielle;
3° un membre n'ayant pas la qualité de député, désigné par le président de l'Assemblée nationale sur proposition du Premier ministre faite après consultation du Chef de l'opposition officielle.

17. Le Comité directeur est chargé de proposer à la Commission des règles de fonctionnement notamment en ce qui concerne la convocation et le déroulement des séances et la procédure applicable aux délibérations.

Il établit le plan d'effectifs et les prévisions de dépenses et autorise les demandes au Bureau de l'Assemblée nationale. Il exerce en outre les fonctions que la Commission lui attribue.

18. Les articles 13 et 14 s'appliquent, compte tenu des adaptations nécessaires, au Comité directeur.

Ce dernier peut se réunir par tous les moyens permettant aux membres de communiquer oralement entre eux.

§ 3.–Secrétariat

19. Pour l'exécution de son mandat la Commission est assistée d'un secrétariat dirigé par le secrétaire de la Commission.

Le secrétaire de la Commission est nommé par les présidents. Sa rémunération et ses autres conditions de travail sont déterminées par le Bureau de l'Assemblée nationale.

20. Sous l'autorité exclusive des présidents, le secrétaire dirige le personnel de la Commission et en administre les affaires courantes.

21. Le secrétaire assiste aux séances de la Commission et du Comité directeur.

Il voit à la préparation des procès-verbaux et peut en attester l'authenticité. Il a la garde des archives de la Commission.
Il exerce en outre les fonctions que lui attribuent les présidents.

22. La Commission peut retenir les services de toute personne pour faire partie du secrétariat.

23. Le président et le secrétaire général de l'Assemblée nationale fournissent au secrétariat tout l'aide nécessaire à l'exercice du mandat de la Commission, y compris l'apport de personnel.

Section IV. Fonctionnement

24. Le quorum de la Commission est de dix-huit membres et celui du Comité directeur, de cinq membres, à l'exclusion des membres suppléants.

25. La Commission peut siéger à tout endroit du Québec.

Elle siège en public, sauf s'il s'agit d'une séance de travail.

26. Les séances publiques de la Commission sont télédiffusées et enregistrées sous l'autorité du président de l'Assemblée nationale. Les délibérations de ces séances sont consignées au Journal des débats.

Les modalités de production, de diffusion et d'enregistrement sont déterminées par le Bureau de l'Assemblée nationale.

27. Sauf disposition contraire de la présente loi ou d'une règle prise par la Commission, les dispositions du Règlement de l'Assemblée nationale et les règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale relatives aux séances des commissions parlementaires s'appliquent aux séances de la Commission, compte tenu des adaptations nécessaires.

28. Si le membre nommé sur proposition des députés de l'autre parti représenté dans l'opposition n'est pas le député qui dirige ce parti, ce dernier peut participer aux séances de la Commission. Il ne peut cependant y voter ni y faire de proposition.

L'article 11 et le premier alinéa de l'article 12 s'appliquent à cette participation.

29. La Commission peut faire toute dépense nécessaire à l'exercice de son mandat. Les dépenses de la Commission font partie des dépenses de l'Assemblée nationale.

30. Le Bureau de l'Assemblée nationale peut exercer, à l'égard de la gestion des affaires de la Commission, les pouvoirs que lui confèrent les articles 104.1, 110, 110.1 et 111 de la Loi sur l'Assemblée nationale (L.R.Q., chapitre A-23.1), compte tenu des adaptations nécessaires.

Sauf dispositions incompatible de la présente loi, les règlements et les règles adoptés par le Bureau et qu'il détermine, relativement à la gestion et aux dépenses de l'Assemblée, s'appliquent à la gestion et aux dépenses de la Commission. Le Bureau peut, par règlement, y apporter des modifications aux fins de l'application de la présente loi.
S'il le prévoit, un règlement du Bureau pris en vertu de la présente loi peut avoir effet à compter de la date d'entrée en vigueur de celle-ci.

31. Les prévisions de dépenses de la Commission sont approuvées par le Bureau de l'Assemblée nationale.

Section V. Dispositions diverses

32. Dès que la Commission a terminé l'exécution de son mandat, le secrétaire verse les archives de la Commission aux archives de l'Assemblée nationale.

La Commission est alors dissoute.

33. Les travaux de la Commission sont protégés contre toute ingérence dans la même mesure que ceux de l'Assemblée nationale.

34. Pour l'application des articles 8 et 48 à 50 de la Loi sur l'Assemblée nationale, la Commission est assimilée à une commission parlementaire.

Le versement d'allocations ou autres sommes d'argent à un député en application de la présente loi ne constitue pas un avantage ou une rémunération incompatible avec la fonction de député et est considéré visé à l'article 73 de la Loi sur L'Assemblée nationale.

35. Les sommes requises pour l'application de la présente loi sont prises sur le fonds consolidé du revenu.

36. La présente loi entre en vigueur le 4 septembre 1990.