« Aux électeurs du comté de Champlain » : différence entre les versions

Aller à la navigation Aller à la recherche
aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Aucun résumé des modifications
Ligne 538 : Ligne 538 :
}}
}}


D'après l'opinion du commissaire des Travaux publics, ce chemin de fer ne PAIERA JAMAIS.  
D'après l'opinion du commissaire des Travaux publics, ce chemin de fer ne PAIERA JAMAIS. Vous pouvez vous attendre non seulement à payer l'intérêt du capital qui serai placé dans cette entreprise mais encore à payer de fortes sommes pour combler le déficit qu'occasionneront pendant grand nombre d'années sans frais de roulage.


TRANSCRIPTION EN COURS...
Le chemin de fer de Québec et de Montréal à Portland, par Melbourne, nous offre tous les avantages désirables pour exporter nos produits. Ce chemin unira Québec et Montréal avec les townships de l'Est et l'État du Maine où les vaisseaux d'outremer peuvent venir en toutes saisons de l'année. Québec sera à 80 lieues de Portland, Montréal à 75 lieues. Y en a-t-il un parmi vous qui préférera passer par le chemin d'Halifax qui aura 212 lieues lorsqu'il pourra le faire par une chemin de 75 lieues? Évidement non, car vous payeriez plus cher pour vous faire transporter ainsi que pour le transport de vos produits!
 
Remarquez bien ceci encore, le chemin de fer de Portland est en partie fait et sera terminé au mois d'octobre prochain. Il est construit par une compagnie privée et ne coûtera rien au pays, le gouvernement n'ayant garanti que l'intérêt d'une partie du capital, capital qui est placé avantageusement et qui produira toujours plus que l'intérêt légal une fois que l'entreprise sera achevée. Mais pour le chemin d'Halifax la chose est bien différente. Le gouvernement en est le propriétaire; l'ouvrage coûtera un tiers de plus que si l'œuvre était exécutée par une compagnie privée. Ce chemin aura, pendant l'été à lutter avec la navigation du St-Laurent et toute l'année, la compétition ruineuse du chemin de Portland. L'entreprise ne PAIERA JAMAIS tant que le Canada demeurera dans l'état de colonie et nous n'avons pas besoin de nous priver des améliorations utiles, de nous ruiner pour faire plaisir à l'Angleterre et enrichir quelques agioteurs politiques.
 
Je m'oppose au chemin de fer d'Halifax parce que c'est une entreprise qui sera ruineuse pour le pays et qu'elle nous mettra dans l'impossibilité d'entreprendre des améliorations dans l'intérieur du pays, utiles et nécessaires et dont le peuple des campagnes a si grandement besoin; parce que le chemin ne sera avantageux qu'aux colonies d'en Bas et à l'Angleterre pour le transport de ses troupes et l'envoie de quelques milliers de ses brigands et forçats qu'elle se propose de nous imposer pour travailler sur ce chemin et qui se répandront dans notre société, une fois l'ouvrage terminé; parce qu'il est toujours mauvais en principe de donner au gouvernement le maniement d'entreprises aussi considérables et que le tripotage de 30 000 000 $ par cinq ou six hommes du pouvoir leur donnera des moyens de corruption des plus dangereux pour les libertés populaires. Le gouvernement n'a pas pu administrer quelques milles de chemin macadamisé sans qu'ils fussent une charge écrasante pour le trésor public, comment voulez-vous qu'il puisse administrer avantageusement 1 500 milles de chemin de fer.
 
Je m'oppose au chemin de fer d'Halifax parce que c'est là une barre de fer destinée à nous unir aux colonies d'en Bas et que je ne veux pas plus de cette nouvelle proposition de mariage du Canada que je ne voulais de l'union des deux Canadas. Quoi! nous unir avec des ''colons'', des ''sujets'' encore plus pauvres et plus misérables que nous, tandis que nous pourrions nous unir avec des ''citoyens'' d'un pays libre, prospère et heureux. Ah! non, mille fois non, pour ma part.
 
Cette barre de fer, le chemin d'Halifax, est aussi destinée à nous lier de plus en plus à la ''mère-patrie''. Je n'en veux pas et je vous dirai plus au long pourquoi lundi prochain. Votez pour le rappel de la loi du chemin de fer d'Halifax.


== Puis enfin et au-dessus de tout: indépendance du Canada et son annexion aux États-Unis. ==
== Puis enfin et au-dessus de tout: indépendance du Canada et son annexion aux États-Unis. ==


J'espère que personne d'entre vous n'est assez déloyal envers le pays pour me faire un crime de désirer l'indépendance de ma patrie. Nous avons souffert plus qu'il ne le fallait de notre état colonial pour nous engager à vouloir enfin acquérir la liberté de faire nos lois nous mêmes, de payer un peu moins d'impôts au gouvernement et d'étendre à volonté nos relations commerciales et industrielles au dehors des limites rétrécies de notre faible population et du territoire qu'elle occupe.
Nous sommes aujourd'hui à charge à l'Angleterre qui paie des sommes énormes, chaque année, pour maintenir ses troupes en Canada. C'est le secrétaire des colonies lui-même qui l'a proclamé au nom du peuple anglais, en nous annonçant par une dépêche soumise à notre législature, durant sa dernière session, que nous serions tenus sous peu de payer les troupes anglaises stationnées en Canada ou qu'elles se retireraient du pays. Quel malheur, quelle calamité pour nous!!
L'Angleterre nous est à charge parce que nous n'avons pas la liberté de nous gouverner nous-mêmes; parce que nous sommes obligés de payer des impôts extravagants, ruineux, pour nous faire gouverner par elle et engraisser une légion de spéculateurs politiques; parce que notre commerce d'exportation, par suite de la nouvelle politique commerciale anglaise a pris une autre direction que celle de l'Angleterre et que ce changement nous a placé et nous retient dans un état des plus désavantageux sous ce rapport; parce qu'enfin il n'y a rien à attendre de notre état de dépendance envers un gouvernement qui siège à 1 200 lieues de nous et que nous serons toujours pauvres et misérables tant que nous serons sujets et colons de l'Angleterre et que le fait seul de notre indépendance ferait augmenter toutes les valeurs que nous possédons et nous amènerait à un état de prospérité que nous n'obtiendrons jamais sous le présent ordre de choses.
Un seul fait nous fera voir de suite ce que nous perdons, pourquoi nous sommes si pauvres et la vie est si difficile à trouver en Canada. L'habitant de l'État du Vermont ou de New York qui nous avoisinent vend son avoine un écu le minot et achète une verge d'étoffe américaine pour le même prix. Vous autres habitants des campagnes vous vendez votre avoine trente-six sous ou quarante sous en moyenne et vous payer trois chelins et demi pour une verge d'étoffe américaine, de sorte que vous donnez DEUX MINOTS d'avoine pour ''la même verge'' d'étoffe américaine que l'américain peut obtenir pour UN MINOT. — Pourquoi cela? — Parce que le seul marché que vous ayez pour vendre votre avoine avantageusement est celui des États-Unis et que pour vous y rendre avec votre grain il vous faut payer ''vingt pour cent'' de droits de douane et que lorsque vous achetez de l'étoffe américaine pour l'apporter ici, il vous faut payer encore ''douze et demi'' pour cent de droits de douane pour passer la ligne qui nous sépare des États-Unis, c'est le marchand qui paye cela pour vous et qui vous le fait payer en achetant votre grain à meilleur marché et en vous vendant ses marchandises cher. Au bout de l'année vous entendez les habitants de notre pays dire partout « mais l'argent est rare, on a bien de la misère à vivre », chacun de vous peut s'expliquer ce malaise en songeant combien sa position est mauvaise vis-à-vis de celle des habitants des États-Unis qui ne paient point d'impôts sur les articles de première nécessité, tels que le sucre, le riz, le thé, le café, la mélasse et une foule d'autres articles du genre.
Il faudrait un volume pour vous faire sentir les avantages de notre indépendance et de notre union avec la glorieuse République américaine. Je vous en dirai quelque chose de plus le jour de la nomination des candidats.
En attendant, sachez que l'Angleterre a donné à entendre par la voix de ses premiers hommes politiques, par la voix du premier de ses journaux que lorsque le peuple du Canada désirerait devenir libre, elle serait prête à lui accorder sa liberté. Messieurs, ceux qui aujourd'hui  s'opposent le plus à demander paisiblement l'indépendance du Canada, sont des hommes qui pour la plupart ont goûté et goûtent encore au gâteau du gouvernement; ce sont des êtres qui s'engraissent au râtelier du régime colonial.
En 1846, le ''Times'' de Londres, l'organe du gouvernement anglais, publiait un article dans lequel on exprimait une idée toute favorable à l'indépendance du Canada. Le ''Journal de Québec'', qui n'était pas alors bourré d'annonces du gouvernement, qui suivait l'opinion de la masse de ses compatriotes était en faveur de notre indépendance comme on pourra le voir dans le petit paragraphe suivant qu'il publiait à cette époque.
Après avoir reproduit partie de l'article du ''Times'' il ajoutait :
{{Citation doc|Comme on le voit, le ''Times'', l'organe le plus puissant du gouvernement britannique actuel, est d'opinion, d'accord avec plusieurs grands hommes d'État d'Angleterre, que, tôt ou tard, le Canada fera partie des États-Unis, et que puisqu'il faut que la chose se fasse, qu'elle se fasse volontairement et de suite de la part du gouvernement impérial, avant qu'il y soit forcé, à la suite d'énorme dépenses et après beaucoup de sang répandu.}}
C'est le ''Journal de Québec'' du 22 janvier 1846 qui annonçait cette nouvelle avec un air de satisfaction. Le ''Times'' a exprimé les mêmes sentiments bien des fois depuis 1846; les hommes d'État d'Angleterre ont déclaré la même chose en parlement. Dans notre pays la cause de notre indépendance a fait un grand pas depuis deux ans, malgré les criailleries de ceux qui ont intérêt à ce que nous restions comme nous sommes. Tous les hommes publics sont d'accord sur un point, celui que nous ferons partie de la République américaine avant longtemps.
Eh bien, je vous le demande, quels sont ceux des Canadiens qui méritent le plus de leur pays? Sont-ce ceux qui s'opposent à toutes les réformes et à tout progrès possibles ou deux qui veulent obtenir au peuple plus de liberté politique en lui faisant élire tous ses officiers publics, en le préparant à son indépendance, à un état de chose qui doit nécessairement arriver pour notre bonheur commun.
J'arrête ici, messieurs, car il faut que je parte aujourd'hui même pour me rendre au milieu de vous. Je vous dirai seulement que je désire l'indépendance de mon pays d'une manière paisible, par la voie des élections, de la Chambre d'assemblée et d'une manière amicale. Je désire que nous nous préparions à cet état de choses en vous obtenant le pouvoir de législater pour vous-mêmes et de n'avoir rien à envier à un pays parfaitement libre et je vous recommande de voter pour un homme qui représentera les idées politiques que je viens d'effleurer dans le présent écrit. Votez pour celui que vous croirez le plus capable de vous être utile en Chambre et qui sera en faveur de l'indépendance de votre patrie malheureuse qui ne peut nourrir ses propres enfants et de son annexion aux États-Unis. C'est le seul moyen d'acquérir ce que les Canadiens ont trouvé aux États-Unis, ce qu'ils y trouvent tous les jours, même d'après les rapports de M. Chiniquy, de l'''espace'', DU PAIN et de la LIBERTÉ!
Je serai prêt à répondre à toutes les questions que vous pourrez me faire sur mes vues politiques, car je ne cherche à tromper personne. Ceux qui n'approuvent pas mes principes pourront votre contre car, moi je ne désire sacrifier aucune de mes croyances politiques pour m'attirer vos faveurs dans la prochaine élection. La tâche que j'aurai à remplir en Parlement, si j'y suis envoyé par vous, sera ardue et difficile à remplir. Ma position ne sera pas enviable, j'en ai la certitude, mais je suis prêt à en accepter toutes les conséquences et je prends l'engagement solennel de vous rendre fidèlement compte de ma conduite après chaque session du Parlement et de vous remettre mon mandat si jamais j'avais la lâcheté de dévier de la ligne de conduite que je viens de me tracer et d'abandonner la cause des libertés populaires de ma patrie.


J.-B.-E. Dorion.
J.-B.-E. DORION.


Montréal, 27 novembre 1851.
Montréal, 27 novembre 1851.
wikieditor
7 390

modifications

Menu de navigation