Déclaration de souveraineté de la Catalogne

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Déclaration de souveraineté de la Catalogne
Palais du Parlement, Barcelone, 23 janvier 2013.




RÉSUMÉ : « Le 23 janvier 2013, le Parlement de Catalogne a adopté une déclaration de souveraineté, par 85 voix contre 41 et 2 abstentions. A la suite de la grande manifestation du 11 septembre 2012, le gouvernement d'Artur Mas avait décidé de dissoudre le Parlement afin de provoquer des élections anticipées portant essentiellement sur le droit à l'autodétermination du peuple de Catalogne. A la suite des élections, un accord entre le centre droit (CiU) et la Gauche catalane (ERC, Verts) a permis l'adoption d'un texte auquel se sont opposés les députés du Parti populaire et ceux du Parti socialiste catalan[1]. » ÉDITIONS : Traduction française : [2], [3]. / En catalan : [4] / En anglais : [5]



Préambule.

Le peuple de Catalogne, tout au long de son histoire, a démocratiquement exprimé sa volonté d'autonomie, en vue d'accroître le progrès, le bien-être et l'égalité des chances de tous ses citoyens, et de renforcer sa culture et son identité collective.

L'autonomie de la Catalogne se fonde également sur les droits historiques du peuple catalan, sur ses institutions séculaires et sur la tradition juridique catalane. Le parlementarisme catalan trouve ses origines au Moyen Âge, avec les assemblées de Paix et Trêve et la Cour comtale.

Le XIVe siècle vit la création de la Diputació del General ou Généralité, qui acquit une autonomie grandissante jusqu'à s'ériger, au cours du XVIe et du XVIIe siècle, en gouvernement de la Principauté de Catalogne. La chute de Barcelone en 1714, suite à la Guerre de Succession d'Espagne, eut pour conséquence la promulgation par Philippe V du décret de Nova Planta, qui abolissait le droit public catalan et les institutions gouvernementales autonomes.

Ce parcours historique a été partagé avec d'autres territoires, créant ainsi un espace commun sur le plan linguistique, culturel, social et économique, ayant vocation à être renforcé et promu sur la base de la reconnaissance mutuelle.

Tout au long du XXe siècle, le désir d'autonomie des Catalans a été une constante. La création de la Mancomunitat de Catalogne en 1914 représente une première étape dans le processus de rétablissement de l'autonomie, aboli par la dictature de Primo de Rivera.

Avec la proclamation de la Seconde République espagnole en 1931, un gouvernement catalan se constitue, sous le nom de Generalitat de Catalunya, doté d'un statut d'autonomie.

La Généralité fut abolie en 1939 par le général Franco, qui instaura un régime dictatorial ayant duré jusqu'en 1975. La dictature dut faire face à la résistance active du peuple et du gouvernement de Catalogne. Une des étapes importantes de la lutte pour la liberté fut la création de l'Assemblée de Catalogne (Assemblea de Catalunya) en 1971, avant le rétablissement, à titre provisoire, de la Généralité, avec le retour, en 1977, de son président en exil. Durant la transition démocratique, et dans le cadre du nouveau système de communautés autonomes défini par la Constitution espagnole de 1978, le peuple de Catalogne approuva par référendum le Statut d'autonomie de Catalogne en 1979 et les premières élections au Parlement de Catalogne eurent lieu en 1980.

Au cours de ces dernières années, en vue d'approfondir la démocratie, la majorité des forces politiques et sociales catalanes ont favorisé l'adoption de mesures visant à transformer le cadre politique et juridique, la plus récente étant le processus de réforme du Statut d'autonomie de la Catalogne engagé par le Parlement en 2005. Les obstacles et les refus imposés par les institutions de l'État espagnol, notamment la sentence 31/2010 de la Cour constitutionnelle, impliquent un refus radical d'une évolution démocratique de la volonté collective du peuple catalan au sein de l'État espagnol et jettent les bases d'un recul de l'autonomie, qui se manifeste aujourd'hui très clairement sur le plan politique, financier, social, culturel et linguistique et en ce qui concerne les domaines de compétence.

Le peuple de Catalogne a exprimé de diverses manières sa volonté de surmonter l'impasse actuelle au sein de l'État espagnol. Les manifestations massives du 10 juillet 2010, sous le slogan « Nous sommes une nation. Nous décidons », et du 11 septembre 2012, sous le slogan « La Catalogne, nouvel État d'Europe », sont l'expression du rejet par les citoyens du manque de respect à l'égard des décisions du peuple de Catalogne.

Le 27 septembre 2012, par la résolution 742/IX, le Parlement a noté la nécessité que le peuple de Catalogne puisse décider librement et démocratiquement de son avenir collectif par le biais d'une consultation populaire. Les dernières élections législatives au Parlement de Catalogne, le 25 novembre 2012, ont exprimé et confirmé cette volonté de manière claire et sans équivoque.

En vue de mener à bien ce processus, le Parlement de Catalogne, réuni au début de la dixième législature, représentant la volonté des citoyens de Catalogne démocratiquement exprimée lors des dernières élections, adopte la suivante :

DÉCLARATION DE SOUVERAINETÉ ET DU DROIT DE DÉCISION DU PEUPLE DE CATALOGNE

Conformément à la volonté démocratiquement exprimée par la majorité du peuple de Catalogne, le Parlement de Catalogne convient d'engager le processus visant à exercer le droit de décision [dret a decidir] afin que les citoyens de Catalogne puissent décider de leur avenir politique collectif, conformément aux principes suivants :

1. Souveraineté. Le peuple de Catalogne a, pour des raisons de légitimité démocratique, qualité de sujet politique et juridique souverain.

2. Légitimité démocratique. Le processus d'exercice du droit de décision sera scrupuleusement démocratique et il garantira en particulier le pluralisme et le respect de toutes les options, à travers le débat et le dialogue au sein de la société civile catalane, de sorte que la décision en résultant soit l'expression majoritaire de la volonté populaire, qui sera le garant fondamental du droit de décision.

3. Transparence. Tous les outils nécessaires seront fournis afin que l'ensemble de la population et la société catalane aient toutes les informations et les connaissances nécessaires à l'exercice du droit de décision et en vue de favoriser sa participation au processus.

4. Dialogue. Un dialogue et des négociations seront engagés avec l'État espagnol, avec les institutions européennes et avec l'ensemble de la communauté internationale.

5. Cohésion sociale. La cohésion sociale et territoriale du pays sera assurée ainsi que la volonté exprimée à plusieurs reprises par la société catalane de maintenir la Catalogne unie comme un seul peuple.

6. Européanisme. Les principes fondateurs de l'Union européenne seront défendus et promus, en particulier les droits fondamentaux des citoyens, la démocratie, l'engagement en faveur de l'État-providence et de la solidarité entre les peuples d'Europe et le pari du développement économique, social et culturel.

7. Légalité. Tous les cadres juridiques existants seront utilisés pour mettre en œuvre le renforcement de la démocratie et l'exercice du droit de décision.

8. Rôle principal du Parlement. Le Parlement, en tant qu'institution représentant le peuple de Catalogne, joue un rôle principal dans ce processus et, par conséquent, il y a lieu de convenir et de définir les mécanismes et les dynamiques de travail garantissant ce principe.

9. Participation. Le Parlement de Catalogne et le gouvernement de la Generalitat doivent faire participer activement dans ce processus le monde local et le plus grand nombre de forces politiques, d'agents économiques et sociaux et d'organisations culturelles et civiques et il doit préciser les mécanismes visant à garantir ce principe.

Le Parlement de Catalogne encourage l'ensemble des citoyennes et des citoyens à prendre une part active dans le processus démocratique d'exercice du droit de décision du peuple de Catalogne.

Palais du Parlement, le 23 janvier 2013.

La présidente du Parlement,
Núria de Gispert i Català.

Le quatrième secrétaire, David Companyon i Costa.