Commission de Commandant en la Nouvelle-France par M. le comte de Soissons, lieutenant-général au dit pays en faveur du Sieur de Champlain, 15 octobre 1612

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Commission de Commandant en la Nouvelle-France en faveur du Sieur de Champlain
15 octobre, 1612




Source: [1]



Charles de Bourbon, comte de Soissons, pair et grand-maître de France, gouverneur pour le roi ès pays de Normandie et Dauphiné, et son lieutenant-général au pays de la Nouvelle-France, à tous ceux qui ces présentes lettres verront, salut.

Savoir faisons à tous qu'il appartiendra que pour la bonne et entière confiance que nous avons de la personne du sieur Samuel de Champlain, capitaine ordinaire pour le roi en la marine, et de ses sens, suffisance, pratique et expérience au fait de la marine, et bonne diligence, connaissance qu'il a au dit pays pour les diverses navigations, voyages et fréquentations qu'il y a faits et en autres lieux circonvoisins d'icelui, icelui sieur de Champlain, pour ces causes et en vertu du pouvoir à nous donné par Sa Majesté, avons commis, ordonné et député, commettons, ordonnons et députons par ces présentes notre lieutenant pour représenter notre personne au dit pays de la Nouvelle-France ; et pour cet effet lui avons ordonné d'aller se loger, avec tous ses gens, au lieu appelé Québec, étant dedans le fleuve Saint-Laurent autrement appelé la Grande-Rivière de Canada, au dit pays de la Nouvelle-France, et au dit lieu et autres endroits que le dit sieur de Champlain avisera bon être, y faire construire et bâtir tels autres forts et forteresses qu'il lui sera besoin et nécessaire pour sa conservation et de ses dits gens, lequel fort ou forts nous gardera à son pouvoir, pour au dit lieu de Québec et autres endroits en l'étendue de notre pouvoir, et tant et si avant que faire se pourra, établir, étendre et faire connaître le nom, puissance et autorité de Sa Majesté, et à icelle assujettir, soumettre et faire obéir tous les peuples de la dite terre et les circonvoisins d'icelle, et par le moyen de ce et de toutes autres voies licites les appeler, faire instruire, provoquer et émouvoir à la connaissance et service de Dieu et à la lumière de la foi et religion catholique, apostolique et romaine, la y établir et en l'exercice et profession d'icelle maintenir, garder et conserver les dits lieux sous l'obéissance et autorité de Sa dite Majesté.

Et pour y avoir égard et vaquer avec plus d'assurance, nous avons, en vertu de notre dit pouvoir, permis au dit sieur de Champlain commettre, établir et constituer tels capitaines et lieutenants que besoin sera ; et pareillement commettre des officiers pour la distribution de la justice et entretien de la police, règlement et ordonnance ; traiter, contracter à même effet paix, alliance et confédération, bonne amitié, correspondance et communication avec les dits peuples et leurs princes ou autres ayant pouvoir et commandement sur eux ; entretenir, garder et soigneusement conserver les traités et alliances dont il conviendra avec eux, pourvu qu'ils y satisfassent de leur part, et à ce défaut, leur faire guerre ouverte pour les contraindre et amener à telle raison qu'il jugera nécessaire pour l'honneur, obéissance et service de Dieu, et l'établissement, manutention et conservation de l'autorité de Sa dite Majesté parmi eux, du moins pour vivre, demeurer, hanter et fréquenter avec eux en toute assurance, liberté, fréquentation et communication, y négocier et trafiquer amiablement et paisiblement ; faire faire à cette fin les découvertures et reconnaissances des dites terres, et notamment depuis le dit lieu appelé Québec jusques et si avant qu'il se pourra étendre au-dessus d'icelui, dedans les terres et rivières qui se déchargent dedans le dit fleuve Saint-Laurent, pour essayer de trouver le chemin facile pour aller, par-dedans le dit pays au pays de la Chine et Indes orientales, ou autrement, tant et si avant qu'il se pourra, le long des côtes et en la terre-ferme ; faire soigneusement rechercher et reconnaître toutes sortes de mines d'or, d'argent, cuivre et autres métaux et minéraux, les faire fouiller, tirer, purger et affiner, pour être convertis et en disposer selon et ainsi qu'il est prescrit par les édits et règlements de Sa Majesté, et ainsi que par nous sera ordonné.

Et où le dit sieur de Champlain trouverait des Français et autres trafiquants, négociants et communicants avec les sauvages et peuples étant depuis le dit lieu de Québec et au-dessus d'icelui, comme dessus est dit, et qui n'ont été réservés par Sa Majesté, lui avons permis et permettons s'en saisir et appréhender, ensemble leurs vaisseaux, marchandises et tout ce qui se trouvera à eux appartenant, et iceux faire conduire et amener en France, ès havres de notre gouvernement de Normandie, ès mains de la justice, pour être procédé contre eux selon la rigueur des ordonnances royaux et de ce qui nous a été accordé par Sa dite Majesté ; et ce faisant, gérer, négocier et se comporter par le dit sieur de Champlain, en la fonction de la dite charge de notre lieutenant, pour tout ce qu'il jugera être à l'avancement des dites conquête et peuplement ; le tout pour le bien, service et autorité de Sa dite Majesté, avec même pouvoir, puissance et autorité que nous ferions si nous y étions en personne, et comme si le tout y était par exprès et plus particulièrement spécifié et déclaré.

Et outre tout ce que dessus, avons au dit sieur de Champlain permis et permettons d'associer et prendre avec lui telles personnes et pour telles sommes de deniers qu'il avisera bon être pour l'effet de notre entreprise, pour l'exécution de laquelle, même pour faire les embarquements et autres choses nécessaires à cet effet, qu'il fera ès villes et havres de Normandie et autres lieux où jugerez être à propos, vous avons de tous donné et donnons par ces présentes toute charge, pouvoir, commission et mandement spécial ; et pour ce vous avons substitué et subrogé en notre lieu et place, à la charge d'observer, et faire observer par ceux qui seront sous votre charge et commandement, tout ce que dessus, et nous faire bon et fidèle rapport, à toutes occasions, de tout ce qui aura été fait et exploité, pour en rendre par nous prompte raison à Sa dite Majesté.

Si prions et requérons tous princes, potentats et seigneurs étrangers, leurs lieutenants-généraux, amiraux, gouverneurs de leurs provinces, chefs et conducteurs de leurs gens de guerre, tant par mer que par terre, capitaines de leurs villes et forts maritimes, ports, côtes, havres et détroits, donner au dit sieur de Champlain, pour l'entier effet et exécution de ces présentes, tout support, secours, assistance, retraite, main-forte, faveur et aide, si besoin en a, et en ce qu'ils pourront être par lui requis. En témoin de ce, nous avons ces dites présentes signé de notre main, fait contresigner par l'un de nos secrétaires ordinaires, et à icelles fait mettre et apposer le cachet de nos armes.

A Paris, le 15e jour d'octobre, 1612.

Signé : CHARLES DE BOURBON.

Et sur le repli, Par monseigneur le comte,

Signé : BRESSON.


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